Les villes: acteurs incontournables de la mise en œuvre des politiques climatiques.
17 /11/ 2022
社评
Lausanne

Tribune ouverte de M. Grégoire Junod, Syndic de la ville de Lausanne et Président de la Commission permanente « Villes et développement durable » de l’Association internationale des maires francophones (AIMF)

Grégoire Junod, Syndic de Lausanne

La résolution des villes à agir face aux changements climatiques et l’impact très direct de notre action ne sont plus à démontrer. Les villes sont à la fois victimes et responsables du changement climatique. Elles consomment à elles seules deux tiers de l’énergie mondiale et dégagent près de 70% des émissions de gaz à effet de serre. Parce qu’elles représentent le principal lieu de vie et d’activités ainsi que le premier espace de participation citoyenne, elles détiennent également des éléments de solutions. Elles sont le lieu où nous pouvons agir ensemble. Toutes politiques climatiques nationales ou internationales demandent une traduction efficace au niveau local et des initiatives développées au plus près des habitantes et habitants.

Pour lutter contre les changements climatiques, la Ville de Lausanne s’est fixé des objectifs ambitieux : 0 émission directe d’ici à 2030 pour la mobilité et 0 émission pour l’ensemble des émissions directes au plus tard à l’horizon 2050. Des mesures de réduction des émissions couplées à des mesures sociales et d'adaptation aux changements climatiques feront de Lausanne une ville 0% carbone et 100% solidaire. L’une des mesures souhaitées par la Municipalité vise la suppression des véhicules thermiques en ville d’ici à 2030. Afin de permettre ce changement de modèle et de libérer de l’espace public, l’usage de la voiture devra diminuer au profit de la mobilité active et des transports publics. Cet engagement ne pourra être mis en œuvre que si les autorités cantonales et nationales adoptent les conditions-cadres et la base légale nécessaires.

Les villes sont à la fois victimes et responsables du changement climatique

Les villes sont des acteurs incontournables de la mise en œuvre des politiques climatiques, mais les moyens leur manquent encore pour les amplifier. Et cette pleine mise en capacité des villes ne pourra se faire que dans une relation de complémentarité étroite et affirmée avec les autorités nationales. C’est tout le sens du message que nous avons porté à Abidjan, en juin dernier, à l’occasion du Congrès annuel de l’Association Internationale des Maires Francophones et de la 1ère COP des Villes, où nous avons lancé un appel commun pour demander d'urgence aux États de prendre des mesures rapides et concrètes pour une application résolue du principe de subsidiarité au sein des frontières nationales comme à l'échelle internationale afin de permettre aux villes et aux collectivités locales de contribuer pleinement à la définition et à la mise en œuvre de la stratégie de lutte contre le changement climatique, conformément aux attentes de nos concitoyennes et concitoyens face à l'urgence climatique.

En effet, si les processus de décentralisation administrative et financière ne sont pas à la hauteur de la responsabilité des villes pour répondre à l'urgence climatique, il en est de même de l'intégration des villes dans les phases de définition des stratégies climatiques mondiales, et de leurs applications. C'est pourquoi nous, les Maires, appelons à un changement de cap ambitieux et déterminant de la part des États pour faciliter l’articulation entre l’ambition des orientations globales et la force de l’action locale. Un tel changement se traduira par :   

  • La reconnaissance officielle du rôle des villes dans la lutte contre les changements climatiques, compte tenu de leur rôle institutionnel et des outils uniques dont elles disposent, en premier lieu les services municipaux et les pouvoirs de régulation en matière d'urbanisation et d’aménagement ;
  • La reconnaissance officielle des municipalités comme représentantes légitimes de la détermination et de l'engagement des citoyennes et des citoyens en matière de changements climatiques. Cela implique, aussi, que les Maires, élus au suffrage universel, soient reconnus dans leur capacité à représenter leur population et leur territoire dans les processus décisionnels nationaux visant à définir des stratégies d'adaptation et d'atténuation du changement climatique ;
  • L’urgente nécessité de doter les villes des instruments financiers et des compétences réglementaires dont elles ont besoin pour réaliser pleinement leur potentiel, dans le cadre d'une approche décentralisée inspirée par le principe de subsidiarité, tout en supprimant les obstacles qui empêchent les villes de coopérer entre elles au niveau international afin d'échanger les meilleures pratiques, de lancer des projets pilotes communs et de développer un plaidoyer international indépendant ;
  • La nécessité d’intégrer des représentants des villes dans les délégations nationales participant aux négociations internationales sur les changements climatiques. 

Grâce à une telle approche multi-acteurs, les villes pourront apporter une contribution à la hauteur de leurs responsabilités, de leurs outils techniques et réglementaires et de la vocation politique que leur confient leurs citoyennes et citoyens et les partenaires locaux.

Ces villes, ensemble, attendent aujourd’hui un geste fort de la part des Etats pour déployer leur potentiel d’action face aux effets de plus en plus désastreux des changements climatiques, dans l'intérêt des générations actuelles et futures. 

Grégoire Junod

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