Laurent Fabius résume les atouts de l’Accord de Paris et les principaux objectifs pour 2016
16 февраля 2016

«Un fait remarquable des résultats de Paris est que toutes les Parties peuvent s’y identifier, et leconsidérer comme le leur. Ce sentiment d’appropriation collective a été rendu possible par le formidable travail accompli dans le cadre de la plateforme de Durban depuis plusieurs années, des réunions informelles tenues au cours de 2015, et de l’engagement bilatéral intense de toutes les Parties. Paris a démontré que le processus de la CCNUCC peut obtenir des résultats tant qu’il est nourri par la transparence, la confiance et une volonté politique résolue. À cet égard, il ne s’agit pas d’’une victoire pour notre seul climat, mais aussi pour le multilatéralisme dans son ensemble.

Quelques commentateurs ont eu la gentillesse d’attribuer cette victoire aux infatigables efforts fournis par la diplomatie française et moi-même. Je serais bien tenté de consentir à cette explication, bien qu’elle cela aille à l’encontre de notre légendaire inclination pour la modestie. Je crois que notre rôle s’est en fait limité à traduire, en langage diplomatique, un alignement unique des planètes. Les impacts de la perturbation du climat n’avaient jamais été ressentis aussi intensément dans le monde– 2015 a été une année record; la science du climat n’avait jamais été aussi claire et consensuelle; les perspectives d’un développement à bas carbone et résilient n’avaient jamais été aussi prometteuses; l’engagement à l’action pour le climat, avec les INDC, LPAA et la plateforme NAZCA, n’avait jamais été d’envergure universelle. Et la volonté politique des dirigeants ainsi que l’esprit de compromis ont fait la différence pour le résultat final, et, à travers lui, a fait une grande différence pour le monde.

L’Accord de Paris représente en effet, à mon avis, le résultat le plus équilibré, complet et ambitieux que nous pouvions espérer atteindre. Ses objectifs à long terme placent la barre à un niveau très élevé en matière d’ambition, que ce soit en ce qui concerne la limite de l’élévation des températures, la trajectoire des émissions, la résilience ou le mouvement des flux financiers. Le processus des INDC et celuidu bilan mondial devraient être suffisamment dynamiques pour permettre aux Parties d’atteindre ces objectifs avec le temps. Il s’agit aussi d’un accord juste : il reflète les responsabilités et les réalités économiques entre les pays, tout en reconnaissant qu’elles peuvent évoluer avec le temps; et il assure qu’aucun pays ne soit laissé pour compte.

Après ce considérable effort de négociation, notre attention collective doit se porter sur la mise en œuvre. Nous avons maintenant l’obligation d’être à la hauteur de l’ambition démontrée à Paris, voire de la surpasser si possible. Nous avons du pain sur la planche. . Au niveau national, chacun de nous doit se préparer à mettre en œuvre les INDC transmises l’an dernier – cela ne signifie pas seulement de les convertir en NDC, mais de les transformer en véritables politiques et programmes publics que nous pouvons mettre en place et et financer. Il est possible que plusieurs pays en développement aient besoin d’aide pour franchir ces étapes. Les moyens de mise en œuvre joueront un rôle important dans la réalisation de telles politiques, dont notamment le renforcement des capacités comme partie essentielle des mesures d’accompagnement ce développement politique au cours de cette période.

Au sein de la Convention, nous avons aussi un calendrier chargé : signer et ratifier l’accord pour qu’il entre en vigueur le plus tôt possible; préparer les décisions de mise en œuvre de l’accord; maximiser l’action de tous et chacun avant 2020; et démontrer, à Marrakech, que nous sommes bel et bien entrés dans une nouvelle ère de coopération mondiale sur le changement climatique. Nous ne pouvons pas donner l’impression que Paris a été un accident et revenir au cours normal des négociations. La France et le Maroc travailleront main dans la main pour s’assurer que ce ne sera pas le cas et nous comptons sur les présidents des organes subsidiaires, sur les présidents du nouveau APA et des autres organes constitués pour nous assister à cet égard.

Je voudrais mentionner un autre aspect, à savoir les secteurs qui ne sont pas couverts par l’Accord de Paris. Je pense, en particulier, aux HFC ainsi qu’au transport aérien et au transport maritime. Les négociations qui seront tenues au sein des structures compétentes ne seront pas faciles, mais la COP 21 a montré que même les négociations multilatérales les plus difficiles peuvent se conclure avec succès. Les progrès de ces secteurs devraient au moins égaler, sinon surpasser, l’ambition de l’Accord de Paris.»

Note à propos du Bureau: Selon la tradition, le Bureau est responsable de conseiller le Président et de prendre des décisions en ce qui concerne la gestion d’ensemble du processus intergouvernemental du changement climatique. Le Bureau a la responsabilité générale des questions de processus. Les membres du Bureau consultent souvent leurs groupes régionaux sur les points à l’ordre du jour. Le Bureau n’est pas un forum de négociations politiques. Il est élu, et compte les représentants des Parties nommées par chacun des cinq groupes régionaux des Nations Unies et des petits États insulaires en développement.

Crédit photo: ministère français des Affaires étrangères