ONU Climat Infos, le 14 février 2023. L'industrie de la mode doit aller « plus loin et plus vite » pour réduire ses émissions et prouver que le secteur est sérieux dans sa volonté de passer d'un changement cosmétique à un changement systémique, a déclaré Simon Stiell, Secrétaire exécutif d’ONU Climat.

S'exprimant lors d'une réunion de deux jours de la Charte de l'industrie de la mode pour l'action climatique, qui s'est tenue à Bonn, en Allemagne, la semaine dernière, M. Stiell a déclaré que des progrès avaient été accomplis, comme le respect des exigences de base en matière de rapports, la divulgation d'un plus grand nombre d'informations liées au climat et la collaboration entre les entreprises, mais que le secteur avait encore un long chemin à parcourir.

C'est bien, mais ce n'est pas suffisant a déclaré M. Stiell. Après cinq ans, l'industrie de la mode n'en est tout simplement pas au point où nous pouvons dire qu'elle est vraiment en train de changer, et que la mise en œuvre est vraiment en cours. Moins de la moitié des signataires actifs respectent les objectifs climatiques nécessaires pour limiter le réchauffement de la planète à 1,5 degré Celsius. Dans l'ensemble, leurs vastes chaînes d'approvisionnement ne sont pas non plus alignées sur les objectifs de la Charte. Telle est la réalité.

La Charte de la mode a été mise en place avec le soutien de l'ONU sur le changement climatique en 2018 pour fournir une voie permettant au secteur d'atteindre des émissions nettes nulles d'ici 2050, conformément aux efforts mondiaux visant à limiter le réchauffement à 1,5 degré Celsius. Parmi les autres engagements de la Charte figurent l'approvisionnement de 100% de l'électricité à partir de sources renouvelables d'ici 2030, l'approvisionnement en matières premières respectueuses de l'environnement et l'élimination progressive du charbon de la chaîne d'approvisionnement d'ici 2030.

Depuis sa création, la Charte a permis de faire progresser les ambitions de l'industrie en matière de climat. Elle a notamment porté le nombre de signataires à 101 entreprises, dont Burberry, H&M Group, adidas, Chanel, Nike et PUMA, ainsi que des fournisseurs tels que Crystal International et TAL Apparel.

Ce que nous avons vu au cours des quatre dernières années, c'est que l'action climatique est devenue une priorité dans nos agendas, a déclaré Stefan Seidel, responsable du développement durable chez PUMA. Nous voyons de grands acteurs du secteur, qu'il s'agisse d'entreprises ou d'organisations, se fixer des objectifs climatiques. Et nous constatons que l'action climatique ou le changement climatique est l'un des principaux sujets de discussion dans presque toutes les réunions industrielles aujourd'hui. Nous pouvons donc affirmer que le changement climatique est devenu un sujet majeur dans notre secteur au cours des quatre dernières années, depuis le lancement de la charte.

Les membres de la Charte sont censés rendre compte publiquement, chaque année, des progrès réalisés par rapport aux objectifs intermédiaires et à long terme, par l'intermédiaire du CDP, une organisation caritative à but non lucratif. L'année dernière, 10 signataires de la Charte ont figuré sur la liste A des entreprises du CDP, démontrant ainsi un réel leadership dans le secteur. Les données du CDP montrent qu'à l'heure actuelle, 45 % des signataires actifs de la charte respectent les objectifs climatiques publics nécessaires pour maintenir le réchauffement de la planète en dessous de 1,5°C.

Toutefois, selon M. Stiell, les émissions du secteur de la mode restent « vertigineuses », émettant chaque année la même quantité de gaz à effet de serre que l'ensemble des économies de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni réunies.

Il est clair que ce secteur doit aller plus loin et plus vite, a déclaré M. Stiell. Le rythme de mise en œuvre de cette charte doit être accéléré et étendre sa portée. Les émissions doivent diminuer aussi rapidement que possible.

Cela va nécessiter un degré radical de collaboration, étayé par la responsabilisation pour s'assurer que les entreprises respectent les engagements qu'elles ont pris.

Le secteur de la mode est extrêmement compétitif et, en tant que personne ayant passé beaucoup de temps dans le secteur privé, je comprends parfaitement ce qu'il faut pour se retrouver ici, assis parmi ses concurrents, a déclaré M. Stiell. Mais c'est la seule façon de travailler si nous voulons arriver là où nous devons aller.

Catherine Chui, vice-présidente chargée de la qualité et du développement durable chez Crystal International, a abondé dans le même sens, affirmant que l'action collective renforce le secteur. Son entreprise est l'un des plus grands fabricants de vêtements au monde, avec 20 usines dans cinq pays et un chiffre d'affaires annuel de 2,1 milliards USD.

La charte de l'industrie de la mode constitue une très bonne plateforme pour nous permettre de travailler en collaboration avec les marques et les autres parties prenantes afin de réduire les émissions, a déclaré Mme Chui. En tant que signataire et l'un des membres du comité directeur de la Charte de la mode, j'espère également pouvoir travailler avec davantage de fabricants et les encourager à nous rejoindre et à suivre cette voie.

Prochaines étapes

Lors de la clôture de la réunion, les membres de la Charte ont convenu qu'un véritable changement implique de collaborer davantage avec les fournisseurs et d'engager l'ensemble de l'écosystème, des producteurs de coton aux fabricants de machines textiles. Il s'agit également d'établir des partenariats au-delà du secteur, les groupes de travail de la Charte étant chargés d'atteindre les parties prenantes dans des domaines tels que la politique, la finance, les transports et l'agriculture.

Table ronde sur la politique du Bangladesh, 27 février 2023 : Un dialogue politique se tiendra à Dhaka, au Bangladesh, pour discuter des possibilités de solutions politiques en faveur de la mise à l'échelle des énergies renouvelables et du rôle du secteur privé pour soutenir cette transformation.

Charte de l'industrie de la mode pour l'action climatique - Rapport d'étape, 28 février 2023 : Un rapport d'étape global sur la divulgation d'informations climatiques par les membres de la Charte de la mode sera publié en collaboration avec le CDP.

Conférence des Nations unies sur le changement climatique (COP 28), novembre/décembre 2023 : Le premier bilan mondial de l'Accord de Paris se terminera à la COP 28. Il permettra à tous les gouvernements et à tous les secteurs de se fixer des objectifs climatiques pour 2030. Les leaders de l'industrie de la mode sont invités à se joindre au processus d'inventaire en soumettant une liste d'actions qui feraient une différence transformationnelle dans le secteur maintenant et les opportunités émergentes pour les décideurs politiques et autres parties prenantes.